mardi 1 juin 1999

Pataphysique Atomique : Partycul System, par Loïc Pailler

N.B. : illustrations à la fin de l'article.

PATAPHYSIQUE ATOMIQUE : PARTYCUL SYSTEM

Mille neuf cent quatre vingt dix neuf, en juin. Venaient de sortir notamment au cinéma The Thin Red Line de Malick, Buffalo ‘66 de Vincent Gallo et The Hole de Tsai Ming-liang, la fréquentation des salles obscures allait rouler jeunesse.
C’était l’époque où Lionel J. et Jean-Pierre C. étaient au pouvoir, temps où “l’urgence sociale l’emporte sur l’ambition sociale”, pouvait-on (déjà) lire dans un journal du soir; ce même mois d’ailleurs, la liste ‘Construisons notre Europe’ conduite par François H. remportait les élections européennes, celle intitulée ‘Union pour l’Europe’ emmenée par Nicolas S. terminant troisième… Dans notre pays, comme ailleurs sûrement, on songeait au film Le Guépard, “il faut que tout change pour que rien ne change”.
Ainsi, la bande-son de Titanic avait trusté les charts de la Fédération Nationale d’Achats des Cadres, number one des ventes, Columbia / Sony aux anges, nos oreilles en sang, elles… Et bien placés dans le trio de tête, on retrouvait respectivement Francis Cabrel, Texas et Patricia Kaas. L’été s’annonçait vraiment difficile...
Et pourtant ! Sortait justement en juin le cinquième (et qui allait se révéler être le dernier) album studio de Pavement, Terror Twilight, Jacno était encore bien vivant - sa Part des Anges tout juste paru n’étant pas une vue de l’esprit - et le punk entamait l’un de ses premiers recyclages avec la réédition du fameux Plastic Box des PIL.
Pareille embellie côté concerts vus à Reims durant ces premiers mois de 99, chaque semaine (ou presque) ressemblant à Noël : les derniers jours de l’année précédente avaient déjà mis la barre très haut avec Cat Power le 15 décembre à L’Usine (en demi-salle, avec Chokebore unplugged en guise d’amuse-gueules); puis le 18 février s’était tenue une soirée haute en couleurs, convoquant les labels Earworm et Active Suspension avec Magnetophone, Ma Chérie for Painting, Avrocar et Tank (ouch !), à la MJC Claudel, talonnée le 24 de mars par Prohibition et Hint (retour L’Usine) pour 50 balles (ou francs, oui le Nouveau Franc). Un mois plus tard, au même endroit, Calexico et Violon Profond (pour 70 F cette fois-ci, Texans obligent !), puis To Rococo Rot et Zenzile le 21 mai, avant la très belle affiche toujours à L’Usine un certain 17 juin, Peter Bruntnell et Edith Frost ouvrant pour The Willard Grant Conspiracy, soit un moment one hundred per cent d’Americana comme on l’aime !
Une telle atmosphère de temps et de lieu ne pouvait qu’être propice : elle le fut. Courant juin donc paraissait le premier album de Roselicoeur, 730 000 dollars, en vinyle. Qu’on allait user très vite sur la platine. Et inaugurant par la même la naissance du label Partycul System.
Quelques mois auparavant, d’autres particules avaient agité les esprits - “élémentaires” et houellebecquiennes celles-ci - et alors que toute la France s’apprêtait à scruter l’infiniment lointain avec la “dernière grande éclipse totale du siècle” en août, de jeunes gens modernes étaient sur le point d’explorer l’infiniment petit, le noyau atomique, héraclitéen, sans certainement s’imaginer que l’aventure allait perdurer jusqu’à aujourd’hui. 
Les observateurs d’alors auraient peut-être dû faire attention au calendrier chinois : cette année du chat n’annonçait-elle pas l’exaltation des qualités propres aux félins, que l’on dit volontiers raffinés, sensibles, doués, ingénieux, mais aussi tortueux, secrets, dilettantes ? Et d’ailleurs, cette espèce n’allait-elle pas orner la rondelle vinyle de la première parution ?
Bref, sortons télescopes, scrutons les pulsations, et attelons-nous à détailler cette apparition dans les cieux (musicaux) rémois en cette fin de siècle.



Ils adoptèrent désormais de nouveaux noms.
Steve Lambrecht devint le Démolisseur. Cassady, vitesse limite.
Kesey, le Matamore, Babbs, le Voyageur Intrépide.
Hagen, qui se propulsait partout avec sa grande caméra et qui planait jusque
sur les rugissements de l’autobus, était le Déphasé.
The Electric Kool-Aid Acid Test, Tom Wolfe
AGRÉGAT D’ATOMES
À chaque génération son heure de gloire : Reims dans ces années 90 regorgeait de groupes, propulsés alors par la multitude de bars, MJC, lieux de concerts qui avaient accompagné cette résurgence musicale dans une ville universitaire qui dans un passé récent avait été le théâtre de rencontres, naissances et rendez-vous marquants. Sans remonter au mythique concert freak Tangerine Dream / Nico en la cathédrale des sacres en 1974, l’éclosion d’un festival comme les Musiques de Traverse en 1981 ou la création de L’Usine rue Lesage avaient balisé le terrain des musiques inventives et audacieuses.
C’est dans ce contexte somme toute assez banal qu’un groupe rassemblant frangins et potes - dans la grande lignée des Creedence, Nouveaux Riches, Migala, Vox Dei ou The Clean - débuta un groupe au lycée paré d’un nom sanglant, Los Matarifes, début 92. Après avoir écumé quelques rades locaux, le véritable tournant eut lieu deux ans plus tard avec la création de Roselicoeur (avec un seul r, la mutation duchampienne intervenant six ans plus tard), cette formation initiale comprenant donc Sharl-Hot Ganache, Denis Locar, Lou Flanagan, S.T.O., Romuald Gabrel et Nicolas Martz, Rosko le Chic intégrant le groupe après le départ des deux derniers cités en octobre 1996.
Peu de temps après paraîtra la première sortie du groupe sur cassette, Voilà pourquoi votre fille est muette, recueil de seize pistes vite désavoué par le groupe et enregistré fin 96 par Jean-Edouard Frognet sur 8-pistes à la MJC Claudel (au n° 1 Place Paul Claudel). Quelques mois auparavant avait débuté leur collaboration avec l’association Les Pirates de l’Art pilotée par Rodolphe Rouchaussé, autre compaňero de la première heure. Et pourtant il contient en germe - outre le titre d’ouverture Les Roses - ce qui fera l’identité future du groupe : détournement d’images, iconoclastie plastique, collage (le sous-titre : The music from Century to the presentday...),  humour potache, forte attirance pour la poésie et appétence pour le non-sens avérée !
C’est vraiment au cours du printemps 97 que le quatuor prend une nouvelle orientation musicale, plus conceptuelle et attentive au son, orientée vers “l’ambiance et les sensations, les images suggérées et les paysages intérieurs (...)”, la conséquence inhérente à cette rupture majeure étant la disparition du chant et le passage au tout instrumental.
Et la création du label ne surviendra que deux ans plus tard, pour cause notamment de mise en veilleuse des activités de chacun, obligations militaires obligent, heurs & malheurs d’un collectif essentiellement masculin en cette fin de siècle dernier !


Alors justement, d’où provient ce nom Partycul System ? 
De la rencontre au sommet d’un certain état d’esprit - amitiés diverses, recours au collectif, convergences musicales - associé à un clair penchant pour l’humour et le fun, soit la volonté de faire les choses avec le sérieux d’un enfant qui joue, comme aurait dit Nietzsche, à plusieurs, le plus longtemps, possible, bâtir une aventure à taille humaine, en lui conservant un côté artisanal assumé, do it yourself comme l’avaient tracé bien d’autres auparavant.
Cela représente une petite bulle à part entière dans un cosmos immense, comme d’ailleurs le rappellera Charlotte Ganache .
Un regroupement d’énergies donc, agrégat de forces qui agitent ses divers protagonistes, en laissant ouverte la polysémie humoristique ; volontairement ou non, quelqu’un comme Christophe Bourseiller, présentant à l’antenne un album du label qu’il programmait, s’y était adonné en parlant à deux reprises de “Partie cul (sic) System”, adoubant le double sens presque malgré lui !
    Alors donc, cinq ans séparent la création de Rroselicoeur de la fondation du label qui allait l’accompagner (lui et bien d’autres) durant les années à venir, cinq ans d’inactivité ? Non, aucun trou noir, aucun abandon, simplement la constitution, lente forcément et progressive assurément, d’un noyau qui allait petit à petit se constituer, d’une famille qui allait grandir, d’une ruche qui allait attirer d’autres contributeurs.
    En guise de double résolution (révolution ?) en ce début d’année 99, début de la préparation du premier opus d’un côté, et de l’autre fondation du “label” en compagnie de Lou Flanagan et Romsteak de Vinyle, avec la claire volonté de fédérer diverses énergies (Julien Rouyer en fera également partie un temps, peu après). Richard Pinhas avait sans doute eu la même ambition vingt-cinq ans plus tôt en créant Disjuncta Records, premier label en France à l’époque à adopter ce mode d’autoproduction - du genre Personne ne le fera à notre place, alors faisons-le d’urgence nous-mêmes ! -  en l’associant à un système de diffusion sous la forme d’une association loi de 1901, thanks Waldeck-Rousseau. Une sorte de R.I.O (pas la ville, le mouvement) à la Rémoise !
Et justement, côté distribution - distro pour faire chic - rappelons cette évidence que ces musiques, bien avant la commercialisation globalisée via la Toile, se dénichaient à la fin du siècle dernier au hasard du maillage de fanzines, catalogues de VPC dits mailorders, et magasins ultra-spécialisés, que l’on lisait et fouillait avidement. 
Parmi eux, citons-en quelques-uns, pour leurs relais essentiels et leur dévouement héroïque : ainsi du catalogue photocopié Meridians (animé par Olivier Henry et Fabien Louis), véritable mine d’or pour les labels underground et porte ouverte à toutes les découvertes; ainsi de Catalimbes, basé à Wattrelos (59), format A5 sur papier bleu, mettant à égalité sur douze pages Mille Plateaux et Bip Hop, Mego et Partycul System, Sub Rosa et Microsphere; ainsi de la défunte boutique Wave Paris (36 rue Keller, dans le 11e), temple des dernières parutions internationales obscures et bizarres, mais pas que. Ou encore le relais de Rejuvenation Records & Distro avec Agnès et Greg, La Belle Dame sans merci et bien sûr Chronowax, pour leur distribution à l’orée des années 2000 de nombreux albums estampillés PS...






Cet album, réalisé avec l’aide d’un ami (Fatalis) qui [l’] a produit, sortit en juin de la même année, et que le webzine britannique Speeder allait de suite chroniquer de la sorte : Probably the best french band I’ve heard in a while, the trio Rroselicoeur create a compelling mixture of fragmentary noise, haunting melodies, and stretched-out post-rock structures. Their debut 12’’, 730 000 dollars (Partycul System), has echoes of bands like Sonic Youth, Mogwai and Hood, all tinged with love so simply fucking things up.
Le mot est lâché - post-rock - qui allait accompagner l’ascension du groupe, et donc du label, durant les années futures.
Officialisé cinq ans auparavant par le critique Simon Reynolds, il allait devenir l’exemple de terme journalistique certes pertinent à ses débuts mais très vite fourre-tout (un peu moins que krautrock, tout de même) : inventé donc pour illustrer la musique d’un groupe comme Bark Psychosis, il caractérisait peu ou prou tout combo à la démarche résolument expérimentale, souvent instrumentale, pratiquant les croisements entre genres musicaux avec allégresse (du noise au jazz via l’electronica, pour faire très simple).
Et c’est vraiment lors de la parution du deuxième album des “Rrose” comme on disait, Drachenhöle,  que le succès va se concrétiser, tant critique (de nombreuses chroniques fêtèrent son arrivée, comme celle-ci consacrée à Mogwai : “Aux Etats-Unis, évidemment, avec des groupes comme Bardo Pond, Labradford, en Ecosse on vient de le voir avec Mogwai, au Québec via le label Constellation et le collectif Godspeed You Black Emperor, mais aussi en France, où officie Rroselicoeur…”) que public (les tournées à la mode Trans-Europe-Express de s’enchaîner alors, en France, Allemagne, Belgique, Danemark, Pays-Bas, Pologne, etc).
Une intense activité scénique va en effet baliser ces trois années et leur permettre de partager entre autres l’affiche avec des groupes comme les Little Rabbits, Do Make Say Think ou dEUS, et de nouer également de belles rencontres, notamment avec les camarades du label canadien Where Are My Records, pépinière de chouettes trouvailles comme Barzin ou Below the Sea (des frères d’armes en quelque sorte qui leur proposeront de sortir, en parallèle à la France, cet album sur le territoire nord-américain assorti d’une pochette différente).
Mais aussi avec les structures hexagonales Waiting for an Angel et Pure Pain Sugar; ainsi, le troisième album qui allait s’intituler Demios Oneiron était mis en boîte au cours de l’été avant de sortir en novembre uniquement sous la mention de ces deux écuries “ (...) qui nous ont donné carte blanche quant au rendu… Ça paraît peut-être pas mais c’est énorme au niveau du sentiment de confiance ! Cela nous a donc fait travailler pour un objectif précis. C’est aussi pourquoi l’album n’est pas sorti chez Partycul System (notre propre label / mouvement / maison).”
Une initiative qui avait déjà connu un précédent deux ans avant sous la forme d’un 7’’ cette fois-ci, partagé avec les bordelais de Cheval de Frise sur la panoptique et très ouverte maison parisienne RuminanCe, terre d’asile d’ensembles allant de Chevreuil à Gordz en passant par US Maple et Ulan Bator, soit un condensé de choix sûrs pour tout auditeur-trice digne de respect…




           Bref, au regard de ces quelques rares exemples sur la période 1999-2003, plutôt frénétique pour le label, on pourrait aisément croire à l’omniprésence de Rroselicoeur sur sa conduite et son expansion; s’il est vrai qu’il fut à ce moment précis le groupe-totem du label, sa cristallisation - remember la sentence “Rroselicoeur est le résumé de Partycul System”, même un séquoia ne peut cacher une forêt.
Et c’est sûrement en raison de ce rayonnement que le System put fédérer autour de lui d’autres projets...

DE L’USAGE DU COLLECTIF
C’est au beau milieu de la confusion qui en résulta, dans cette cohue surexcitée où
éclataient des bagarres comme des graines dans le joint d’un surfer, que Weed
Atman, absorbé par certains aspects plutôt obscurs sur la théorie des groupes qu’il 
venait juste de lire, s’amena innocemment en rêvassant.

Vineland, Thomas Pynchon
    Car si la constitution du label était dans les esprits à l’époque, cette période fut plutôt mise à profit à la fois pour travailler à l’émergence d’un son mais aussi d’un collectif : ces échanges et tissages d’amitiés musicales se traduisirent ainsi sous deux formes notamment avec d’une part l’émergence d’un curieux collectif sur Reims, Matamir, et de l’autre la programmation des soirées Équilibre Instable.
“Rassemblement d’acteurs de la vie musicale rémoise, animés par un état d’esprit commun”, le souhait “de ce collectif est de favoriser l’émergence d’une scène locale active, sans cloisonnement de styles”; nous sommes alors au printemps 1999, et la première (seule ?) apparition de ce projet aura lieu lors de la Fête de la musique, Place du Forum à Reims. Éclectisme et trans-genres au menu : on y croise entre autres, outre Rroselicoeur et sa “musique acrylique”, les groupes Submerge et Lyssa (tous deux sur Shogun Records, le label de Phil Kieffer),  ou encore Con Una Pugnada de Arena (dont le bassiste jouera ensuite dans Tielnich et Harpon, le batteur dans Submerge) et Inward Access (où l’on retrouvait à la batterie un certain Jason…).
Plus notable, tant en terme de durée que de collaborateurs, fut la série des Équilibre Instable, parrainée par les Pirates de l’Art. Elle apparaît même avec le recul comme un projet parallèle à la fondation du label et à l’évolution de Rroselicoeur à ses débuts, mais aussi comme une matrice des projets à venir, au sens où ces sessions ont toujours été conçues non comme une récréation (encore que, mais alors au sens de respiration ludique), mais comme le coeur de la politique de Partycul System (label coopératif), par sa volonté d’échange et d’ouverture.

Privilégiant l’approche improvisée sans aucune barrière de styles et en multipliant les invités appelés à changer d’instruments au cours des 2 à 3 heures de cette performance revendiquée comme éphémère, Équilibre Instable est basé sur une conception éminemment collective de l’improvisation qui saurait renoncer à toute démonstration technique, spectaculaire et vainement virtuose .

Tout est dit, on croirait pratiquement lire le manifeste du label !
Tout aussi notable est la liste des participants à ces cinq rendez-vous (du premier qui eut lieu à la MJC Claudel le 29 mai 1998, au dernier qui résonna dans les locaux de la Petite Scène - Salle Eugène Wiet le 26 avril 2002) : si le volet 1 ne comprenait que Denis Locar, Lou Flanagan, S.T.O et Charlotte Ganache (soit Rroselicoeur première mouture au quasi grand complet), on y croisera ensuite nombre de vétérans de la scène rémoise (de Nicolas Baumann à Jean-Marc Wadel, via  Béber Lee Hills et Philippe Genest), mais aussi des membres d’Electro:Lux, Andy’s Car Crash ou Un Automne à Lob-Nor, groupes à l’époque ayant partagé tournées ou split avec le label (sans oublier Heliogabale ou Cheval de Frise pour des figures un peu plus connues).
Sans lien avec ces soirées, signalons néanmoins celle organisée à la MJC Claudel circa 2002, où invitation fut lancée à l’écurie belge (K-RAA-K)³ pour y présenter ses purs-sangs tels que KöHN, le projet de Jürgen De Blonde, fan absolu de la première heure...

    L’heure est donc à la politique d’ouverture en ces années de maturation pré-label et alors que Rroselicoeur vient tout juste de sortir son premier véritable opus comme nous l’avons vu, même si n’oublions pas que la réelle première parution d’un disque sous ce nom date de juin 1997, sous la forme d’un 45 tours partagé avec un autre fameux groupe rémois d’alors, les Bumblebees (la face A pour les Rroselicoeur, avec Quand vient le tourment, la face B dévolue aux Bumblebees et leur titre (-diesel-)). Ce split 7 pouces était alors sorti sur le micro label seine-et-marnais LIaNoRa Records, créé par le regretté Benoît Sonnette…
Ce fut le cas également lors d’une formation aux techniques du son orchestrée à Troyes par les Pirates de l’Art à l’automne 99, qui permit aux jeunes pousses de côtoyer d’autres barons locaux, la génération d’avant, en la personne de John Marron et Manel Bigot, ci-devant tenanciers de The Very Large Structure of Universe Orchestra . Hormis la parution de leur Grand Hall sur PS en 2002,  cette rencontre sera le prélude à la création dans la foulée d’une espèce de “super-groupe” comme disent nos amis américains, Supersoft [14-18], qui allait au fil des années agréger nombre de musiciens gravitant autour du label, une véritable structure à géométrie variable, sorte de Blackjack (super)sonique sous la bannière de l’improvisation.
Leu première réalisation commune - une fusion parfaite des groupes Rroselicoeur et T.V.La.S.Un.Or - parut à l’automne 2000 sous la forme d’un cinq-titres dénommé L’île continent, mixant les influences et sensibilités des deux ensembles, et “s’éloignant encore un peu d’un carcan “rock” trop souvent lié à la scène indépendante (...)” comme le relevait fort justement 
une chronique de l’époque .
Un enregistrement d’ailleurs fort perturbé par Lothar - pas le roi africain comparse de Mandrake, mais la fameuse tempête-ouragan du 26 décembre 1999 - qui mit à rude épreuve les circuits électriques de la MJC Claudel, provoquant coupures sur ruptures durant les prises de son !

Comme tout bon tremblement qui se respecte, la réplique n’allait pas tarder à se faire sentir avec la sortie deux ans après d’une bien belle série intitulée Twin Powers, au principe fort simple : une face dévolue à un membre du label, l’autre à un invité, ici pour le premier volume Supersoft [14-18] et le combo bordelais Andy’s car crash pour cette rencontre au sommet (le second volet, Twin Powers # 2, associera lui en 2004 le régional de l’étape Ethyleen Leiding à Ocre).
    Outre cette communauté supersoftienne (toujours audioactive à ce jour, deux splendides vinyles venant de sortir coup sur coup en 2011 et 2013), Partycul attira également dans ces années 2001/2 d’autres pistoleros très proches du label et de ses activités : on pense au Népalais, avec le lapointien Bons baisers de nulle part et sa chanson française tendre et décalée, mais aussi bien sûr à Denis Locar’ songs, side project buissonnier d’un des Rrose en vacances, et dont le label édita le très attachant L’interparoissiale [... croisade], collage sonore tout en “attitude lo-fi & altitude stratosphérique”, où quelques titres peuvent sonner comme un écho troublant au légendaire unique album du groupe Hellebore, sorti sur Ayaa  en 1985, autre non moins mythique label de Reims…
    Et comme pour célébrer ces nouveaux entrants, avant d’accueillir d’autres arrivants, la compilation Les champs du cyclotron vol. 1 permit à la fois en 2003 de cartographier la pluralité du label (en offrant à chacun de ses affidés d’y glisser un titre inédit) et aussi de fêter les déjà quatre années de ce “rassemblement d’hommes et de femmes libres, mûs par une volonté d’expression, de réflexion et de proposition.” 
Au menu, dix propositions musicales en un peu plus d’une heure, et une pierre séminale et panoramique versée à cette “recording corporation & home production” qu’était devenu Partycul System. Huit ans plus tard, histoire d’arpenter le chemin parcouru, surgira le deuxième volet, Cyclotron # 2, à la magnifique pochette kraft cartonnée dessinée par Anne-Sophie Terrillon, où figureront les “Grands Anciens” (de 4tRECk à Denis Locar en passant par T.V.La.Sun.Or) associés à des invités, voisins du label de coeur et d’esprit
    On retrouvera d’ailleurs sur ces samplers de jeunes pousses qui n’allaient pas tarder à bénéficier d’une édition : outre Breezy Temple (le duo folk composé de Sharl-Hot Ganache et Miss Moon, voir plus loin), le projet Guinea Pig (rebaptisé bientôt chevo légé pour d’obscures raisons de propriété intellectuelle) de Thomas Fernier sera l’une des grandes sorties attendues, avec le proliférant Bientôt votre mariage qui déboulera dans les bacs en 2003, gavé de “sons ramassés, joués & manipulés depuis le début du siècle par Guinea Pig” 
comme le proclament les notes du livret !
Une politique d’ouverture élargie cette fois-ci aux frontières communautaires en intégrant deux partenaires européens, l’un anglais en la personne de Sam Callow aka 4tRECk, l’autre allemand avec l’entité navel.
Une fois de plus, l’heure est à l’éclectisme, en signant la samba bariolée et bricolée sur l’établi du premier, et l’ambient sovieto-spatiale des seconds, un pari qui pourrait ressembler à un grand écart mais qui tout logiquement colle au premier amendement de PS, qui “refuse toute étiquette musicale”, ainsi en est-il ! 
Et même au-delà, avec le grand pont jeté par les parisiens de Lena Circus vers le Japon, et cette sortie concomitante courant 2012 de deux splendides CD agrémentés d’une sur-pochette cartonnée, l’une rouge, l’autre bleue, tous deux enregistrés en compagnie de performers nippons.
 Une double sortie notable sur un autre point : pour la première fois, cette sortie a été permise en la partageant avec un autre label, Mimimi Records, ce qui laisse augurer fort probablement d’autres alliances de co-production dans l’avenir...

DES ACTIVITÉS CONNEXES
Mon but n’était pas seulement de m’en sortir honnêtement, ou de sauver l’honneur.
 C’était de créer l’événement. Je le faisais pour la Poésie. Je le faisais pour Rimbaud,
 et je le faisais pour Gregory. Je voulais insuffler dans le mot écrit l’immédiateté
 et l’attaque frontale du rock and roll.


Just Kids, Patti Smith.

Mais ce qui fait également de Partycul un cas à part chez les labels du temps fut très tôt la place conférée à d’autres champs d’expression, laissant certes à la musique une place prépondérante mais n’hésitant pas à considérer l’écrit, le verbe, comme une de ses activités à part entière, car Partycul System n’a été, (...), qu’une ‘officialisation’ par un nom de pratiques artistiques déjà entamées, mais éclatées et sans emblème. 
Une certaine idée de la diversification atypique chez nous mais beaucoup plus répandue chez nos amis anglo-saxons, où le concept de ligne Maginot délimitant parfaitement chaque discipline artistique sans la moindre interférence est bien moins répandu... Car les incursions vers d’autres sphères para-musicales ont jalonné la vie du label, et ce dès avant sa création.
    Ainsi, avant que le label ne vienne au monde, Charlotte Ganache avait déjà sorti deux recueils de poésie, Rêvations et sa couverture cauchemardesque en 1996 et Between the aut and the aunt quelques mois plus tard (et exercera au fil des années cette activité parallèle, en marge du label, en participant à des revues de poésie ou des soirées).




On retrouve par exemple dans ces deux premiers recueils de textes écrits entre mars 1990 et juin 1996 comme le rappellent les notes - et aussi dans vacarme la quasi-totalité des textes des chansons de la première cassette de Rroselicoeur . 
Ou l’écriture comme matrice de la musique à venir.
D’ailleurs, dans une geste musicale et amicalo-oulipienne, Ganache allait demander à quinze participants piochés dans les cercles satellites du collectif, de se réapproprier le recueil Between the aut and the aunt, soit de proposer trente trois versions (tours ?) différentes de textes choisis par ses soins, en transposant à la littérature (...) le concept musical du remix. C’est-à-dire modifier ce que l’on désire d’un morceau pour en créer un autre “frère”, “cousin”, “clone”, “monstre”... (selon l’ampleur de la dérive) .
Deux autres recueils suivront en 1997/8, Le chantier nu et Carnets de guerre lasse .
Toutes sorties faites bien dans l’esprit de la maison, imprimées noir & blanc sur format A5, reliées à la baguette à anneaux ou piquées, aux couvertures sous haute influence Secret Service (à-la-Linder-Sterling-et-Jon-Savage pour faire court), la pagination alternant textes et quelquefois photo-montages ou collages divers, bref de très beaux spécimens de poésie-photocopie tirés en de multiples exemplaires et distribués gratuitement aux connaissances, proches, amis.
    Mais fidèle à l’esprit de camaraderie et du réseau, allait surgir avec le nouveau siècle-millénaire le polème, “journal de polésie” crypto-desprogien comme le mentionne le catalogue Partycul System, revue de poésie trimestrielle gratuite / 500 exemplaires papier et  en ligne sur le site du label avec layo à la permanence, Jean Urolles en faction, El Manel de service, Ganache en factotum et d’hétéroclites invités.
Le premier de ces journaux, le bien-nommé numéro zéro, sortit en janvier 2000, et son manifeste de rappeler qu’il était (...) né de la rencontre fortuite de quatre polètes qui faisaient de la polésie chacun dans leur coin, sans rien demander à personne, pendant que leurs muses, elles, se retrouvaient en cachette et buvaient du Southern Confort [sic] en disant du mal.
Dix numéros seront édités jusqu’en décembre 2002, en intégrant d’autres auteurs au hasard des parutions (Dans chaque polème ou presque, un invité se glisse parmi les quatre permanents, pour le contraste nécessaire, pour les bienfaits de l’accueil et pour éviter le vase clos si facile. On a pu retrouver des poètes, des dessinateurs, des calligraphes...). On croisa ainsi au fil des parutions la calligraphiste Rosanna, la poétesse Wania Jaikin, ou les dessins de Manel Bigot, dit Jean-Jean .
Cette vulgarisation de la pensée et de l’écriture poétique, imaginée dans une optique de décloisonner et la façon de faire et la manière de s’approprier la poésie, culminera avec deux éditions de la Saint-Polème à La Comédie de Reims, avec la lecture à trois voix de textes issus de ce corpus pour le premier, et celle du triumvirat Caroline Chaudré / Layo / Mathilde Michel 












pour la seconde. 

    Et toute cette entreprise artisanale, véritable deuxième facette du label, allait trouver peu après un prolongement éditorial plus conséquent et “sophistiqué” avec la publication du recueil le polème, sous-titré revue de polésie pol 1 et paru sous la numérotation PS 011, à l’instar de toute autre production discographique.
Il sortit 350 exemplaires numérotés de cette édition de 136 pages en décembre 2003 - pile un an après la Saint-Polème dont une photographie orne les premières pages - seize participants apportant leurs contributions diverses et variées (qui des visuels, qui des poèmes, qui des gravures, qui même des recettes culinaires) ! Un objet-livre très libre illustré d’une magnifique tête de cerf et orchestré par Ganache et Layo.
Ce dernier réitérera d’ailleurs deux ans plus tard avec la sortie de son recueil personnel, Ce que montrent les tortues, également édité par Partycul System sous le code PS 015, également tiré à 350 exemplaires numérotés.
À signaler d’ailleurs, et ceci pour montrer les incessants aller-retours entre textes et sons, poésie et musique, que ledit Layo fera paraître un 4 titres sur CD en 2005, intitulé Grand Ordinaire (avec livret externe contenant les paroles) sous le nom de LW. Un acronyme réunissant deux vieux compères, lui et John Marron (oui, celui de T.V. La. S. Un. Or et Supersoft [14-18]), et même Bigot croisé dans un polème… Histoire de boucles, de cercles, de rencontres.
Ce disque sera distribué par Partycul System, sans en être le producteur.
    En prolongement à ces sorties éditoriales, et profitant d’une mise en sommeil discographique dans la vie du label (suspension de Rroselicoeur, envie de se ressourcer, quête d’un emploi, peut-être un vague harassement à porter à bout de bras cette aventure), Charlotte Ganache prit l’option de programmer un ensemble de sessions un tantinet atypiques, les Sonorama, afin de confronter lectures de textes d’une part et son contrepoint musical de l’autre (que ce soit un concert ou le dévoilement d’une discothèque personnelle / idéale).
L’idée était d’organiser chaque soirée selon le diptyque suivant : les lectures pouvaient revêtir au gré des sessions le schéma suivant (soit par une carte blanche donnée à un poète, soit en faisant appel à des lecteurs récurrents du label, en l’occurrence Miss Moon et Loïk Stalker, autour d’une thématique, soit en donnant le choix à un comédien d’explorer une oeuvre de son choix), la partie musique quant à elle étant assurée par un groupe/artiste ou confiée à un invité appelé à dévoiler sa discothèque idéale. 
Cycle qui allait durer trois ans, de l’été 2004 au printemps 2007, soient dix-sept éditions au compteur, et au final dix-sept instants enchanteurs rendus possibles grâce au soutien sans faille d’Olivia Mercier.
    Le coup d’envoi en fut d’ailleurs très Partyculier as usual, en ce sens qu’il réunit exclusivement des membres du label ou ses janissaires. Question lectures, elles furent assurées par Layo et Jérôme Nicolle, tous deux accompagnés en musique par John Marron - soit quelque part un prolongement vertueux du polème paru quelques mois avant -  mais aussi Miss Moon et sa sélection de textes d’auteurs du Grand Jeu. Une sorte de passage de témoins rémois orchestrée à 75 ans de distance (dont d’ailleurs je ne me lasse pas de trouver une ressemblance frappante entre



le logo de Partycul System et la “gidouille”, cette spirale dessinée par Alfred Jarry et reprise par les “Phrères simplistes” autour de René Daumal en guise de signe distinctif. Mais ceci n’est qu’une impression...). 
Et pour la partie concert ce soir-là, on fit appel aux fondamentaux du label, en l’occurrence en la personne de Lou Flanagan, ou plutôt de son projet d’alors, Ethyleen Leiding (entendu sur la prime compilation Les champs du cyclotron en 2003, conversant guitaristiquement avec un épervier éperdu !).
Les éditions futures allaient justement s’ouvrir à des intervenants venant d’autres horizons, plus ou moins connus, mais pour beaucoup en tout cas sacrant leur première venue à Reims.
Et nombreuses furent les soirées mémorables et uniques à la médiathèque Jean-Falala : du concert des allemands de navel, tout de cosmonautes vêtus dans une veine post-Devo, aux lectures habitées de Bernard Heidsieck ou Lucien Suel en passant par la prestation hallucinée et psyché-folk de Paul LaBrecque lors d’un Sonorama spécial (“Deluxe” comme annoncé sur l’affiche), le Tsantsas Dias Y Bronca Total (Gala Partycul System / le jour des têtes coupées et de l’extrême pagaille) en décembre 2006 ! Toujours faire confiance aux titres …
Du beau, du volatile, des ondes telluriques, et ce juste au pied de la cathédrale des Sacres, tout en panache !
Finalement, ceci conforta cette particularité de Partycul au sein du paysage hexagonal, avec les risques que cela comporte. Jusqu’à aujourd’hui, des personnes nous font comprendre poliment que si on pouvait être un label post-rock qui sortait des cd de groupes post-rock, ce serait parfait ! (...) Alors que nous nous considérons plus (de l’intérieur) comme un mouvement, une coopérative  d’initiatives obsédantes, un collectif et une amicale de dynamiteurs, comme le souligna Ganache. Le drame, toujours, des itinéraires balisés…

Impossible de conclure sur les liens tissés entre musique et poésie sans bien sûr revenir sur la sortie en février 2004 du Cattleya songs sous le nom de Breezy Temple, groupe réunissant  Sharl-Hot Ganache, Miss Moon et Raavi Lenon dans sa formation originelle.
Cet album incarne en effet la fusion la plus parfaite de cette identité du label, en mettant en musique divers textes empruntés au panthéon poétique anglo-saxon, d’Emily Jane Brontë à Oscar Wilde via Lewis Carroll.
Lou Flanagan sera derrière les manettes lors de l’enregistrement - une activité de producteur qu’il exercera à plusieurs reprises tout comme Denis Locar - lors de l’unique album à ce jour du projet, “ballade lunaire incantatoire” de 69 minutes, rough folk hanté par l’Amérique que Benoît Richard qualifiera ainsi : Intimiste mais pas trop, [il] ouvre de belles perspectives et laisse augurer un avenir radieux à ce charmant duo, voeu qui semblerait se concrétiser courant 2014/15…
Anyway, souvenons-nous de de cette soirée du 12 mai 2003 à La Lune des Pirates (Quai Bélu à Amiens) où fut remis en mais propres à … Bill Callahan himself un CD 4-titres promo de l’opus à venir. Fort logique à la lecture des notes de pochette où Monsieur Smog se voyait dédicacer le mélancolique titre White Wing….



            Une autre sphère  investie tout au long de la vie du label fut le visuel, au sens large : de l’organisation d’expos photos (on pense par exemple à Fauto-masques imaginée par Denis Locar) à leur utilisation au hasard des parutions (comme les inserts ou les captures vidéo de Christophe Acker dans le polème, ou en guise d’illustrations des nombreuses pochettes d’albums, ou du VJing improvisé avec Frédéric Charcot lors d’un concert de Supersoft [14-18]), en passant même par la création de vêtements sérigraphiés Rroselicoeur (remember les liquettes sous la houlette de Denis Locar assisté de Clémentine Treu !), là encore, l’attachement à une certaine esthétique, associé à un fort esprit participatif (en mettant à profit compétences de celles et ceux qui gravitent autour de l’univers PS) est une de ses marques de fabrique.
Un magazine avait d’ailleurs demandé à Rroselicoeur si l’image occupait “une place importante dans [votre] recherche artistique ?”, et eux de répondre :
C’est une question compliquée pour nous. Nous ne sommes pas friands des projections à tout va, comme de plus en plus de groupes le font. (...) La façon que nous avons de nous habiller avant, pendant et après les concerts participe aussi de cette maîtrise de l’image sous toutes ses formes et donc en premier lieu la nôtre. (...) L’image est donc très importante pour nous mais nous voulons au contraire, par ce moyen, plonger le spectateur dans un espace où tout n’est pas cohérent (...).


Quinze ans, donc. A tenter de décrire cela, on reste forcément parcellaire, on oublie, on s’attache trop aux faits, ou alors on surestime certains détails, on tâtonne, bref c’est la vie.
Et la vie d’un label, ça se tient à bout de bras, surtout quand une farouche volonté d’indépendance la sous-tend. Car fidèle à cette bonne vieille ligne de conduite qu’est le DIY, tout se fait tout seul (ou presque) : des coups de fil aux mails incessants aux groupes, des échanges de fichiers aux derniers calages de mixage, de la quête de dates ou de lieux de concerts aux recherches de collaborations et lancements de projets, de la conception des pochettes et de leurs notes (Ganache et Denis Locar pour le Twin Powers 1, Mamass pour le split sur RuminanCe, ou Virginie Paicheler pour le Breezy, pour n’en citer qu’à la volée) à toute la masse (critique) d’écrits entourant chaque nouvelle parution, en passant par la rédaction des contenus des dispositifs électroniques dont s’est doté le label (du site web www.partyculsystem.com avec Aassif Benassarou et Miss Dalaï Dali, aux réseaux sociaux, chaîne YouTube, pages Discogs et Bandcamp), un vaste champ d’investigations en somme mêlant thérapie de groupe et galvanisation des troupes, chacun dans l’écurie ayant son tempo singulier, ses motivations et préoccupations propres, en faisant attention à prendre en compte la vie (artistique s’entend, mais pas seulement…) de tous, car faire vivre un micro-label comme celui-ci, parfait exemple de structure ultra-précaire et fragile, demande un engagement humain et financier (chaque sortie étant auto-financée par ses membres) conséquent et une passion indécrottable. 
Bref, un beau et magnifique bordel, avec juste ce qu’il faut en terme d’organisation foutraque et d’affects humains à ménager ! “It’s only rock’n’roll”, comme dirait l’autre. 
Car, faut-il le repréciser, en PS s’agite toute une demie centurie de bénévoles, d’artistes plasticiens, de photographes, réunis par une même alchimie sensible, un peu hippie, un peu punk, un peu barrée, jamais avares de tenir une caisse ou la distro lors des concerts, qui toutes, à un moment ou un autre, comptèrent, et continuent de le faire.
Bien sûr aussi, en tentant d’être synthétique, on risque d’être lacunaires : oubliées par exemple, les galères liées aux salles de répétition et/ou d’enregistrement, le Xanadu pour tout bon groupe qui se respecte (non, vous ne sauriez rien ici des obscurs Klub, Motel 223 ou Rroseland Laboratorium, noms de codes de bases avancées qui doivent demeurer secrètes, c’est dans leur essence) ; oubliés aussi certaines personnes ici passées à la trappe, qu’elles nous en excusent (je pourrais citer Jason Noble, Chris Sutherland, Warren Ellis, Some Tweetlove, Emiter, Gubbe, Rrose Tacet).

Alors, à l’heure où le label fait sa Quinceañera profane et profuse, qui aurait imaginer parmi ses fondateurs qu’ils seraient toujours là quelques années plus tard ? Personne, si ce n’est que le fait de découvrir toujours d’autres sons ou univers, de rencontrer des gens animés et curieux, de leur faire confiance et de révéler en eux des ressources qu’ils ne soupçonnaient même pas, oui alors c’est sûrement logique que Partycul System, cette centrifugeuse à rêves, et celui qui l’anime au premier chef soient toujours là. Réussite, alors ? Si l’on résonnait en comptable, sûrement pas. Mais si l’on songe aux quelques centaines de personnes qui à un moment ou un autre écoutèrent ou vibrèrent à l’une des manifestations du label, eh bien oui, on peut parler de succès, d’autant qu’à l’heure du tout-marchand, Charlotte “cheerleader de cette petite entreprise” Ganache aime à rappeler “qu’un mail de félicitations de Thurston Moore vaudra toujours mieux que 10 000 albums vendus” !
Et comptons sur lui pour les initiatives à venir : son nouveau projet Feu Robertson devrait sous peu sortir son premier album, et les coopérations avec de nouveaux futur(e)s Partyculièr(e)s de se préciser, histoire de donner chair à cette prophétie qui accompagnait la sortie presse de la première compilation du label : “Après autant de promesses il nous tarde de connaître les nouvelles aventures de Partycul System.” 
Restez aux aguets, elles arrivent.

So long, endless.

Loïk Stalker, le 29 juin 2014